Yake Lakang rêve qu'il voyage





et la famille ?              A la deuxième poignée du troisième coffre, Yake Lakang était plongé dans l'étude de la et il s'endormit en plein jour. Il rêva qu'il effectuait une mission sur la planète Milpodvash et qu'il tenait un carnet de bord où cohabitaient des hexagrammes, des mathèmes et des croquis explicatifs bien lisibles.

Il instruisit en songe l'histoire naturelle de Milpodvash, concernant la conscience minérale, les surfaces pensantes, les liquides vivants, les herbes qui marchent, les arbres qui sautent, les céréales qui nagent, les mousses parachutistes, les quadrupèdes à sustentation approximative, les oiseaux télépathes, les poissons-peintres et les insectes sculpteurs, ainsi que les malédictions, la sorcellerie, le dimorphisme, les moeurs et les manières de vivre des Milpodvashiens.
       
Il se voit en route vers le Nord. Il décrit au passage les artefacts les plus remarquables. Il traverse des champs de coquillages et voit des pantodromes impressionnants. La population se fait plus clairsemée, les eldila sont de la variété fumigène. C'est le Grand Continent du Nord-Ouest. Les montagnes abritent des pfifltriggi et plusieurs grands tueurs de hnakra et de cloportes. Les licornes ne sont pas plus grosses que des dahuts des Pyrénées. On s'abstient de donner des aux pelgranes car on les nourrit avec des Les plantes s'appellent mange-loup, porte-hermine, lance-poule, chasse-épervier et brise-grue. Les animaux se groupent par cinquante ou par mille pour voter. Les troupeaux se mélangent, mais chacun finit par retrouver ses copains.

La Fête des Saucisses Solipsistes survient, et avec elle, les sauteurs, les moussants et plusieurs sortes de repoussants. Le soleil vert surplombe les montagnes. La neige de méthane semble une eau frémissante. Les saucisses sont innombrables, comme les arbres d'une forêt. Et notre rêveur marche toujours d'un bon pas. Il voit sa chambre et son grand lit. Il faut franchir un glacier, puis un lac, puis des marais. Infatigable, il marche et prend des notes.

En continuant vers la cuisine, il rencontre des bouteilles vides. Une route maritime rejoint la salle de bains. Le chemin du vaillant explorateur referme enfin sa grande boucle. Une à une, dans le paysage, les chaussettes sales lui sont familières. La mission se termine à bon port.

Curieusement, Yake Lakang n'a jamais publié ce rêve de voyage. Cependant, il a souvent dit à Cochonfucius que cette excursion onirique l'a profondément marqué. Prochainement, nous accompagnerons ce texte d'un avertissement, d'une présentation et d'une biographie de Yake Lakang. Un tel document scientifique, dont la présentation ne sera pas austère, traduira cette joyeuse soif d'apprendre d'un homme persuadé qu'il était une figure majeure de la science de son temps.