les reptiles
Escher fut un démiurge à la vision fertile. Ses mondes infinis n'engendrent pas l'ennui, Traversés comme ils sont de prodigieux circuits ; Des monstres étonnants y trouvent domicile. L'art de la perspective, étrange et difficile, La juxtaposition du jour et de la nuit, Ces coups de maître sont un simple jeu pour lui. Il enlève et remet leur relief aux reptiles, Et l'on voit tournoyer ces amusantes bêtes, Soit plates, soit montrant d'innombrables facettes; Or, notre oeil ne sait pas quel monstre il a suivi. Tableau mille fois vu, on y revient encore ; L'esprit en y plongeant se perd et se dévore, Dans la contemplation toujours inassouvi. |
un retournement
Notre vie est parfois en surprises fertile. L'autre jour un buveur, pour vaincre son ennui, Avait trinqué jusqu'à être absolument cuit. Il prit le chemin du retour au domicile. Son ivresse était grave et ses pas difficiles ; Alors qu'il titubait dans une hostile nuit, Un crocodile rose a surgi devant lui. « Ivrogne ! Ivrogne ! Ivrogne ! » a crié le reptile. Or, le buveur furieux s'empara de la bête Et la retourna comme on fait d'une chaussette. Un instant de silence aussitôt s'ensuivit. Mais l'animal vaincu se manifeste encore. De nouveau l'on entend son organe sonore, Et voilà qu'il criait : « Engorvi ! Engorvi ! » |