encore un sonnet
rivière








  Cette intervention prend la forme d'un sonnet.

  S'agit-il d'un sonnet nocturne ? Peu importe.

rose





Encore un hommage à Robert le Diable

Ma pensée suit son fil ainsi qu'une rivière ;
Parfois une cascade accélère ce jet
Et parfois un visage y trouve son reflet,
S'il vient près de son bord la jolie lavandière.

Cette rivière tourne à sa propre manière,
Emportant les cailloux qui la berge jonchaient
Lorsqu'une crue lui fait découvrir la forêt
Où souffle tout l'été une brise légère.

Je suis claire et limpide, habillée de mon eau,
Ma surface brillante est une fine peau
Que les quatre saisons fidèlement épousent.

Il va vers l'océan, mon cours déjà pesant,
Je le sens au lointain, obscurément présent,
Avec la vague immense en guise de pelouse.



un éternel retour

Fleuve parfois tari qui dans l'Histoire plonge,
Ayant la majesté, le calme d'un gisant,
Comme un miroir obscur pour les jours du présent ;
Et du sable au milieu, où l'avenir s'éponge.

Au long de ton pays ton rivage s'allonge,
Où viennent méditer les humbles paysans
Et l'âme des seigneurs devenus vers luisants,
Qu'un tourment d'autrefois toujours harcèle et ronge.

Je vois l'eau qui avance en descendant des monts
Et ne remonte point comme font les saumons,
Mais quand elle est en mer, cette eau qui s'évapore

Revient vers les sommets, à la force du vent
Et se fait source pure, et ruisseau, comme avant,
Et le fleuve en lui-même à nouveau s'incorpore.


   la peinture chinoise

Si je navigue, c'est pour contempler les eaux.
Je m'assieds sur la rive et renvoie mon bateau,
Je vois sur le talus un canard qui somnole
Sous un arbre très vieux, parmi les herbes folles.

Quel jardinier nocturne a taillé les roseaux ?
Un poisson étonné le demande aux oiseaux.
Si j'avais mieux appris quand j'étais aux écoles,
Je dirais tout cela en charmantes paroles.

C'est un plaisir issu du plus lointain passé
Quand, formant de sa plume un vigoureux tracé,
Un poète offre au monde une peinture neuve ;

Mais poète ne suis, rien qu'un flâneur oisif,
Et ne peux qu'évoquer, d'un passage cursif,
Ces ravissants abords d'un vénérable fleuve.