encore un sonnet
Cochonfucius vu par Stéphane Cattaneo








Cette intervention prend la forme d'un sonnet.

S'agit-il d'un sonnet nocturne ? Peu importe.

une friche

Le maître de ces lieux m'a confié son jardin,
Je m'en suis occupé de façon nonchalante.
La terre était fertile et fort belles les plantes,
Mais mon goût du travail m'avait quitté, soudain.

J'aimais voir la rosée briller dans le matin,
Et glisser l'escargot dans l'oisiveté lente,
Et dormir l'araignée dans les heures brûlantes.
Je n'aimais pas creuser, ni me salir les mains.

Ainsi ce beau jardin s'est transformé en friche.
La mauvaise herbe y croît dans une terre riche,
Mainte graine oubliée sous une pierre dort.

Des flatteurs croiront voir une grande sagesse
Dans ce qui n'a été qu'une simple paresse...
Ah, je ne sais pas si je dois leur donner tort.


* * *


      un ermitage

      Un abri délabré dans le soleil levant :
      Sur la fin de ma vie, j'en ai fait ma demeure ;
      Il frémit doucement quand la brise l'effleure,
      Nul n'est seul s'il entend sur lui passer le vent.

      Ce jardin qu'autrefois nous allions cultivant
      S'est transformé en friche où la rocaille affleure ;
      Les insectes variés qui là vivent et meurent
      Sont une compagnie pour l'ermite écrivant.

      Frères me sont aussi les nuages qui passent
      Et les vents hivernaux devant qui tout se glace,
      Et puis le crépuscule à la rouge couleur.

      Automne, hiver, printemps, mes saisons familières,
      Vous visitez ce tas d'herbe folle et de pierres ;
      L'été viendra sécher ce qu'il reste de fleurs.




un nuage

J'ai rêvé que j'étais devenu un nuage,
Et je me nourrissais de photons savoureux
Tout en accompagnant les vents aventureux
Qui m'avaient éloigné de la mer et des plages.

Tout était nouveauté, en ce premier voyage,
La ville minérale ou le bocage ombreux,
L'aigle en sa solitude ou les humains nombreux,
Et les mille détails de chaque paysage.

Mais ma force a décru, soudain, l'autre matin.
Il manquait la moitié de mon corps de satin
Et, presque à chaque instant, je perdais quelques grammes.

C'est notre sort à tous, prenons-le patiemment,
Nuage pour toujours n'est pas au firmament,
Aux jardins franciliens je déverse mon âme.