De 1757 à 1761, le chevalier d'Éon (non encore travesti) est secrétaire d'ambassade
à Saint-Pétersbourg. Au cours de cette période, il rédige un rapport sur l'état
de l'Empire de Russie. Il commence par en décrire l'imposant cadre géographique, et notamment
les productions agricoles et les voies navigables, mais aussi les établissements ecclésiastiques
et la psychologie du citoyen ordinaire : il est adroit et robuste, mais enclin à l'ivrognerie,
et surtout, il tend à contrecarrer les entreprises des étrangers sur la terre de Russie,
que ce soit par des tromperies ou par des tracasseries perpétuelles. C'est toute une tradition d'indolence
qui s'offusque en présence des preneurs d'initiatives.
Parlant de l'aristocratie, il note qu'elle est nostalgique du temps où Moscou était leur capitale, et que la tsarine Elisabeth partage parfois ce sentiment. Mais cela ne va pas jusqu'à remettre en question la prépondérance de Saint-Pétersbourg, héritée de Pierre le Grand. | ||