les licornes
La licorne de brume a fait un camembert, Ce fut pour en offrir à un vieux roi barbare ; La reine, apprenant ça, sévèrement déclare L'exil de la licorne en un lointain désert. Puis la licorne rouge a composé des vers Qu'elle chante en grattant sa petite guitare. Et la reine a conduit la licorne à la gare, Lui faisant prendre un train pour le diable vauvert. Mais la licorne bleue s'en alla dans les dunes, La licorne arc-en-ciel s'envola vers la lune, De licorne au royaume il ne va plus rester. Regardons de plus près le portrait de la reine : Ce n'est pas une vouivre, et pas une sirène, C'est la licorne rose en grande majesté. |
deux cents éléphants
Ayant sur son chemin trouvé une oie magique, Le bonhomme en échange obtient un grand cheval Sur lequel il s'en va, loin du pays natal, Jusqu'en Inde où l'on voit des jardins magnifiques. Le cheval, s'amusant sur la place publique, Prend deux cents éléphants (il en veut, l'animal !) Et pratique avec eux un jeu original : Une balle, cinq murs, un vacarme horrifique. Le roi de ce pays survient à la mi-temps Pour parler avec eux, déguisé en marchand ; Ils disent que son règne est fort peu méritoire. Il leur donne raison. Le bonhomme devient Le nouveau roi de l'Inde, et s'en sort plutôt bien ; Ceux du pays natal avec lui viennent boire. |
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Vingt-deux lettres ---------------- Tav se croit vérité, Shin reprend ce discours ; Qof et Resh n'ont rien dit, lettres qui peu s'empressent. Tsadé, trop équivoque, et Pé, la pécheresse, Ayin, lettre du crime, et Samekh, du secours, Noun du pas chancelant, Mem du roi dans sa cour, Lamed et Kaf de gloire, Yod en son allégresse, Teth pour ce qui est bon, Heth avec son adresse, Zayn du souvenir, Hé, Vav aux secrets lourds ; Daleth de pauvreté, Guimel du réconfort, Beth de bénédiction, Aleph au noble corps, Le Créateur choisit de n'en retenir qu'une. Vous avez deviné que ce n'est pas Aleph, Car de notre alphabet il doit rester le chef ; Et lui, du divin choix, ne garde pas rancune. |
Paon-Théon
Marchant jusqu'au palais qui a sept ouvertures, J'ai demandé au roi de placer des gardiens, Auprès de chaque porte, et qu'ils regardent bien Ce qui entre et qui sort, en fait de créatures. Voici donc ces bestiaux, tous, selon leur nature : L'éléphant, le dragon, le loup, les acariens, Le coq, le paon, le porc et quelques amphibiens, Tels sont les animaux qui par là s'aventurent. Puis, le paon et le coq, on les métamorphose En aigles des sommets ; le loup, en autre chose Qui mieux sache écouter la voix de la raison. Le porc et l'éléphant, sous leur forme nouvelle, Deviendront vos chevaux. Mettez-leur une selle, Et vous chevaucherez vers les quatre horizons. |
une auto-parodie
Le bord de l'univers n'offre aucune ouverture, Il n'a, par conséquent, nul besoin de gardiens. L'écart entre le mal qu'on peut faire, et le bien, Est, de fait, ignoré par mainte créature. La plupart des vivants ignorent leur nature. Pas de perplexité au coeur des acariens, Nul sens de l'ironie aux cerveaux d'amphibiens Qui au fond des notions jamais ne s'aventurent. De têtard en crapaud, s'il se métamorphose, L'amphibien ne voit pas qu'il devient autre chose ; S'il le voyait, il n'en verrait point la raison. Point pour eux de mauvaise ou de bonne nouvelle, Ni de particulière, ou bien d'universelle, Ni le désir de voir plus loin que l'horizon. |