Mandelstam voit un lion
Je me souviens d'un sonnet peu classique. Marie, d'un lion, fut suivie au désert Pour un motif bien évident, bien clair : Le charpentier n'était point tyrannique. Il a rentré ses griffes horrificques : Marie lui semble un fruit presque trop vert, Il n'en veut point pour mettre le couvert, Lion que nourrit la manne mirificque. Et cependant, Marie devint si tendre : Bénédictions sur elle de s'étendre, Et plus ne fut le désert sablonneux. Or, ses cheveux à la blonde rousseur Du jeune lin acquirent la douceur : Le Seigneur Lion devint son Blasonneux. |
La femme du charpentier
Quand Gabriel a dit : « Marie, tu seras mère », Tu compris que ton fils irait à triste mort, Et tout en acceptant l'inacceptable sort, Ton coeur versa sur lui des larmes très amères. Puis tu l'as fait grandir d'une vie de lumière, Lui montrant qu'on ne doit à nul causer de tort, Que pour dire le vrai il faut parler bien fort, Sans trop se montrer tendre à ce corps de poussière. Puis tu l'as vu marcher sur les humbles sentiers, Et les prêtres doutaient qu'un fils de charpentier Ait droit de célébrer les divins sacrifices. Enfin, parmi la foule, à son exécution, L'effroi gagnant ton âme en noire perdition, Tu l'as vu, transpercé, sur les bois de justice. |