un autre sonnet
Cochonfucius vu par Stéphane Cattaneo








Cette intervention prend la forme d'un sonnet.

S'agit-il d'un sonnet autobiographique ? Peu importe. Ce qui est vrai, c'est qu'il dégage une fragrance onirique. En voici le texte, suivi d'un bref commentaire.

Un rêve de janvier 2010

Un rêve partagé n'a rien de virtuel.
Il instruit le réel bien plus qu'il ne l'imite,
Dans ce parcours obscur, prends garde aux stalagmites :
Elles ne sont guerriers qu'on peut battre en duel.

Sans doute, un rêve, c'est le brouillon d'un poème.
Si je savais jouer sur le fardeau des mots,
J'en composerais un, car quand j'étais marmot
J'en construisais parfois, entre deux théorèmes.

Ce que t'offre la nuit n'a rien d'une illusion,
Même s'il n'est pas bon que fassent intrusion
Mes rêves dans les tiens, par Dieu sait quel prodige.

Par le songe ne peut cette âme être assouvie,
Mais lorsque nous rêvons, nul surmoi ne fustige
Ceux qui, pour une nuit, vivent une autre vie.
   Un bilan

Composer un poème est un acte de foi.
Ce n'est pas seulement parler de joie, de peine,
De l'ennui remplissant les jours et les semaines...
Ce n'est pas que pleurer sur un tort d'autrefois ;

C'est dire le présent, sans passion et sans haine,
Les bras ouverts prenant la forme d'une croix,
Le bonheur fugitif auquel, quand même, on croit,
Et le vent de printemps qui fait l'âme sereine.

Pour écrire un poème, il faut juste une plume
Et peut-être un semblant de désir qui s'allume
Par un échauffement de l'imagination.

Les mots sont à chacun dévolus en partage
Ainsi que le pouvoir de lire les images ;
Après... cela demande un peu d'application.


Le refus de l'intervention du surmoi et l'irréaliste "I'll let you be in my dreams if I can be in yours" ("tu pourras venir dans mes rêves si tu me permets d'aller dans les tiens") expriment un rapport ambivalent avec la loi des hommes (et avec les sonnets réguliers). Or, ce n'est qu'au dernier vers que nous comprenons que cette ambivalence traduit le malaise d'un dormeur qui rêve. Toute la difficulté d'une lecture linéaire apparaît là. Que par la suite, ce même dormeur compose des poèmes ne doit pas nous surprendre. Et qu'entre la folie et le désir, ainsi qu'entre les rimes et les amours, ne puisse régner que le malentendu, c'est le fait du réel. Mais, tant pour les récits que pour les passions, le prix de leur inachèvement sera identique. Invoquer un quelconque effet onirique ne servirait de rien dans ces pages. Seule la vertu du penseur, parfait antagoniste du rêveur, pourra dénouer cette situation peu claire. Encore y faudra-t-il les flammes de la nuit. Bref, ne vous conduisez jamais comme le dormeur qui nous est présenté ici.

Apprenez plutôt la splendeur des versifications d'autrefois.